Introduction
Lorsque
nous entendons parler d'éthique, nous comprenons généralement qu'il s'agit de
valeurs, de recherche de sens. En fait, je suis porté à croire que chaque
personne, peu importe son origine sur la planète, ressent des aspirations de
«vie bonne» et de recherche du «Bien». C'est l'interprétation de la «vie bonne»
et de la recherche du «Bien» qui diffère selon les personnes. La culture de
chaque société , tissée avec les expériences particulières personnelles, se traduit
par ce qu'on appelle la subjectivité. C'est la raison pour laquelle, dans le
but de dépasser les subjectivités, le discours de l'éthique appliquée, que
j'utilise, recherche une prise de décision qui créera une ouverture au partage
de sens pour toutes les personnes qui seront touchées par l'action décidée.
Contexte de la situation
Je suis abonné au journal "Le
Devoir". En regardant l'édition électronique du 16 février 2013, je vois
dans la colonne de droite "En vedette, Jacques
Parizeau en entrevue au Devoir"
Comme le sujet m'intéresse, je clique
sur le lien et je retrouve:
Jacques Parizeau en entrevue au Devoir
15 février 2013 23h25 | Alexandre Shields | Éducation
Avec, sous la photo de Jacques
Parizeau, le texte suivant:
"L’entrevue accordée au Devoir par l’ex premier ministre
Jacques Parizeau et publiée le 12 février a suscité un vif intérêt. Pour
nourrir la réflexion, nous livrons ici
le compte-rendu complet de
cet entretien portant sur l’enseignement supérieur."
En lisant ce compte rendu complet de
l'entretien, je remarque un ajout important de ce qui avait déjà été publié le
12 février dernier:
À la question du journaliste:
"Existe-t-il
certaines conditions, en matière de fonctionnement des universités, à
considérer si l'on choisit la gratuité scolaire ?"
Jacques Parizeau répond:
"Si l'on allait vers la gratuité, c’est-à-dire en contradiction
avec ce qui se fait sur le continent, mais aussi dans plusieurs pays d’Europe,
ça implique une redéfinition des universités. Il faudrait des examens d’entrée.
Il faut éviter ce que la gratuité entraîne.
Quand
je me suis inscrit à la faculté de droit, à Paris, dans les années 50, j’ai
payé 8 $. J’étais au doctorat, donc il y avait un peu moins de monde. En
première année de licence, il y avait 4000 inscrits. La plus grande salle de la
faculté de droit avait 200 places. Il y avait beaucoup de gens qui
s’inscrivaient pour prendre une chance. Il y avait un abattage terrible dès la
première année. À la fin, il restait 400 inscrits.
Aux HEC, quand j’étais professeur, on a ouvert les vannes. En
première de bac, on avait 900 étudiants. Aux examens de décembre, il y avait un
abattage terrible. Il en partait 300. Il y avait une foule de professeurs qui
enseignaient à des coulés virtuels. Donc, s’il y a la gratuité, il y a un
resserrement à faire. Il faut changer un peu la structure. L’Université de
Montréal, en ouvrant toutes grandes ses portes, est rendue à 76 000 étudiants.
C’est trois fois Harvard. Si on va vers la gratuité, il faudra repenser nos
modèles d’université. Il faudrait notamment consolider les études longues, qui vont
du baccalauréat au doctorat."
La réponse de Jacques Parizeau
implique alors un contingentement des places disponibles dans les différentes
facultés ce qui enlève, alors, un poids énorme sur les incidences financières.
Avoir eu connaissance, de cette
question et réponse dans l'article du 12 février, aurait passablement changé
mon opinion dans ma façon de percevoir une avenue de la gratuité scolaire et
aurait changé ma perception, que m'a donnée cet article, de Jacques Parizeau
lui-même. D'ailleurs, d'autres personnes ont peut-être eu le même genre de
mauvaise perception; dans deux titres du journal, la même journée, nous
retrouvons:
"Le pavé
"Gratuité scolaire: les ministres
péquistes banalisent la sortie de Parizeau
12 février
2013 16h48 | La Presse canadienne | Éducation" http://www.ledevoir.com/societe/education/370723/gratuite-scolaire-les-ministres-pequistes-banalisent-la-sortie-de-parizeau
Je ne suis pas certain que, si
l'article avait été complet dès le départ,
on aurait titré un "Pavé" et pas certain, non plus, que les
ministres péquistes auraient eu à banaliser la sortie de Jacques Parizeau.
Probablement devant la crédibilité et
le sérieux de la réputation du journal Le Devoir, cet article du 12 février a été
repris par beaucoup de médias sans que l'on ait vérifié si l'article était complet:
Radio-Canada http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2013/02/12/004-jacques-parizeau-gratuite.shtm
Journal de Montréal http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#urlMedia=http://www.radio-canada.ca/Medianet/2013/CBF/CestBienMeilleurLeMatin201302120710_4.asx
Journal "La Presse http://affaires.lapresse.ca/opinions/chroniques/francis-vailles/201302/13/01-4621064-parizeau-luniversite-et-les-droits.php
Sur
Yahoo http://fr-ca.sports.yahoo.com/news/parizeau-gratuit%C3%A9-scolaire-envisageable-180817502.html
D'ailleurs,
le 16 février, à la suite de la parution du texte complet, paraissait au journal
Le Devoir, un article de Robert Dutrisac ajoute, justement, un bémol à
cette gratuité scolaire qui ira jusqu'à faire grimacer Françoise David:
"De son côté, Jacques Parizeau a réussi, dans une
entrevue accordée au Devoir, à donner de la crédibilité à l’idée de la
gratuité. Les étudiants qui se battent pour la gratuité « ne sont pas
hors-norme, ils ne sont pas hors d’ordre ». Mais l’ancien premier ministre a
ajouté que la gratuité impliquerait « une redéfinition des universités » et
l’imposition d’examens d’entrée. Au Journal de Québec, la présidente du réseau
de l’Université du Québec, Sylvie Beauchamp, abonde dans le même sens. Dans un
pays comme la Finlande, où l’université est gratuite, 90 000 candidats passent
des examens d’entrée et le tiers seulement est admis. Sans compter que dans les
grandes écoles françaises, par exemple, les étudiants issus des classes riches
se paient une année de préparation et sont ainsi favorisés.
À la perspective d’un contingentement accru, Françoise David,
tenante de la gratuité, grimace. Elle s’oppose aux examens d’admission et à un
contingentement plus sévère qu’à l’heure actuelle." http://m.ledevoir.com/politique/quebec/371131/le-sommet-de-la-feuq
Questionnement en rapport à
l'éthique appliquée à ce cas
Mon questionnement et mon malaise se
situent là; avec l'impression de voir, alors, une manipulation de l'information en
ayant retenu une partie déterminante de ce qu'avait dit Jacques Parizeau.
Ce qui a été publié la journée du 12
février était vrai, mais d'avoir décidé
de retirer la réponse de cette
question ("Existe-t-il certaines conditions, en matière de fonctionnement des
universités, à considérer si l'on choisit la gratuité scolaire ?"),
pénalisait la possibilité, pour le lecteur de se faire une opinion juste de la
pensée de Jacques Parizeau.
Pour faire suite à l'introduction, je
reprends la définition de l'éthique appliquée que j'utilise:
En
rapport à une situation donnant lieu à un malaise, le travail que je consens à
faire avec d'autres dans le monde, par le dialogue, afin de discerner et
décider les actions en créant une ouverture au partage de sens pour toutes les
personnes impliquées par ces actions.
J'essaie de vérifier si l'action
décidée créait une ouverture au partage de sens pour toutes les personnes en
cause. Alors je pose les questions suivantes:
Est-ce que, d'avoir décidé d'omettre
la question "Existe-t-il certaines
conditions, en matière de fonctionnement des universités, à considérer si on
choisit la gratuité scolaire ?" dans l'article initial du 12 février, permettait
un partage de sens pour les lecteurs, pour les ministres, pour Jacques Parizeau,
pour l'ASSÉ, en fait, particulièrement, pour toutes les personnes qui ont pris
position suite à l'article incomplet du 12 février?
Est-ce que les médias, qui ont repris
cette nouvelle, auraient dû vérifier si l'article était complet avant de
publier leurs opinions?
J'aimerais bien connaître votre
opinion à ce sujet.