Introduction
L'éthique et l'éthique appliquée font
ressortir des valeurs importantes. L'éthique dans sa propension (élan naturel) à
désirer la vie bonne et à rechercher le bien et l'éthique appliquée dans le
discernement des actions à privilégier afin de créer une ouverture au partage
de sens pour toutes les personnes touchées par les actions décidées.
Le désir de la vie bonne et de la
recherche du bien (éthique) concerne donc une personne unique, distincte, se
situant dans un pays, une culture, un système d'éducation, une famille, des
expériences personnelles uniques, etc.
Le discernement des actions à
privilégier, afin de créer une ouverture au partage de sens pour toutes les
personnes touchées par ces actions (éthique appliquée), a pour objet un vivre
ensemble constitué de plusieurs personnes pouvant être de plusieurs pays
d'origine et de cultures différentes, influencés par différents systèmes
d'éducation, de familles différentes et des expériences personnelles
différentes pour chaque personne, etc.
Tout commence donc par une
personne subjective vivant un malaise devant une situation lui faisant vivre un
conflit de valeurs. Devant un tel malaise, la personne a le choix : soit de ne rien
faire et de laisser aller ou de décider et de chercher à corriger la situation
à partir de ce qu'elle croit être les bonnes valeurs, la vie bonne et le bien.
Même si elle agit de bonne foi, avec honnêteté et intégrité, elle est sujette à
des inexactitudes par sa subjectivité. Les valeurs qu'elle privilégie
sont-elles des valeurs partagées ? Ce qu'elle reconnait comme le bien,
est-ce vraiment le bien partagé par les personnes autour d'elle ? Voilà la principale difficulté que je
rencontre dans des discussions en éthique appliquée : l'incompréhension de
la subjectivité.
Si l'interprétation du désir de
la vie bonne et de la recherche du bien passe par la subjectivité personnelle,
le discernement des actions à privilégier, afin de créer une ouverture au
partage de sens pour toutes les personnes touchées par ces actions, se fera par
le dialogue avec les personnes touchées par la situation problématique. Il y
aura rencontre de multiples subjectivités.
Objectivité vs Subjectivité
Souvent, dans des discussions qui
s'éternisent, afin d'arriver à un résultat rapide on entendera quelques fois :
"essais d'être objectif !"
L'objectivité est la qualité de ce qui est impartial, qui n’est
pas influencé par les sentiments, les opinions ou les intérêts. Elle se fonde sur
l'expérience de ce qui peut être directement observé. Autrement dit, être objectif,
c’est accepter d’être un objet en essayant de rationaliser comme une machine le
ferait sans émotions, sans histoires passées et à venir (figé dans le temps).
La subjectivité est le caractère
de ce qui concerne le sujet, qui peut être influencé par les sentiments, les
opinions ou les intérêts, elle est partiale. Elle ne peut pas être observée directement
de l’extérieur. Autrement dit, être subjectif, c’est accepter d’être un
sujet en reconnaissant être le seul à penser comme je pense, à être un individu
limité et, par conséquent, être incertain parce que je ne détiens aucune vérité.
Il y a donc toujours de l’incertitude dans ce que je crois être le « vrai »,
le «juste», le «beau».
Tout ce que nous interprétons
passe par nos perceptions filtrées par les lunettes de notre subjectivité qui
est caractérisée par nos limites personnelles et nos acquis historiques. L'être
humain ne peut qu'être subjectif.
Si on demande à deux personnes,
qui mangent un morceau de la même tablette de chocolat, ce que cela goûte,
elles répondront "du chocolat". Mais êtes-vous certains que
véritablement les deux personnes ont la même expérience du goût du chocolat.
Certaines personnes aiment le goût de chocolat, d'autres non. Et même si les
deux personnes aiment le goût du chocolat, il n'est pas certain que ce soit avec
la même expérience.
Je présente, ici, deux peintures
de Monet
Elles sont différentes; pourtant,
même si elles ne portent pas le même titre, il s'agit du même pont sauf en deux
temps différents. Cela nous permet de voir l'effet des cataractes chez Monet.
Deux temps, deux interprétations différentes. Et s'il avait fait des peintures
à toutes les années !
Autre exemple, mon épouse, pour
un travail universitaire, avait, comme dix de ses collègues de classe, à
produire un résumé d'un livre. La semaine suivante, chaque étudiant présentait
son résumé. Elle me dit dans la soirée : c'était vraiment drôle, bien
qu'il y ait des similitudes, on aurait dit qu'il s'agissait de onze livres
différents.
Difficultés de la subjectivité
La subjectivité représente des
difficultés lorsque la personne croit qu'elle détient la vérité, qu'elle sait
ce qui est bien, qu'elle sait quoi faire, qu'elle a raison. D'ailleurs elle est
sûre d'elle, car elle agit à partir de ses valeurs profondes et celles-ci sont
reconnues dans la société où elle vit… C'est ce qui est arrivé aux personnes
qui ont piraté un avion et l'on fait jeter sur le World Trade Center.
Richesse de la subjectivité
La personne est unique. Vous qui
me lisez, vous êtes la seule personne à penser comme vous pensez. Vos
appartenances, vos expériences, votre façon d'interpréter les situations font
de vous un être incomparable, original, exceptionnel. Voilà pourquoi il est
essentiel que vous preniez part au dialogue car vous êtes la seule personne
pouvant exprimer les nuances de votre interprétation.
Alors, lorsque que vous participerez
à un dialogue dans un groupe, si lors d'un tour de table, une personne
dit : "je pense comme telle personne" et qu'elle ne dit rien de
plus, dites-lui de reprendre, dans ses propres mots, ce que l'autre personne a
dit afin qu'elle puisse apporter les nuances qu'elle seule peut susciter dans
le dialogue. Refuser de participer au dialogue prive le groupe de son originalité,
de son unicité.
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